Après la ville blanche (Udaipur), la ville bleue (Jodhpur), voici Jaisalmer, ville jaune. Elle est située sur l'ancienne route de la soie.
A la sortie de la gare, pour la première fois de notre voyage, nous sommes attendus : Jamin, le gérant de l'hôtel où nous allons nous récupère. Notre précédent hébergement nous a conseillé un hôtel récemment ouvert par un couple franco-indien. Ici, tout le monde a des cousins partout. Ils sont bien évidemment solidaires. Nous sommes au "Neem hôtel" (200 Rp la chambre double) ; le luxe cette fois ci résidera dans un écran plat dans la chambre. L'occasion de découvrir la télé indienne qui est peu représentative de ce que l'on voit autour de nous. Les films sont un combiné de zorro et de la vérité si je mens avec des scènes très longues. Il y a bien sûr l'équivalent de nos séries B. Environ toutes les 10 minutes, les programmes sont interrompus pour laisser place aux publicités. Comme les clips, celles-ci sont très occidentalisées. Il y a un réel décalage entre ce qui est diffusé et la vie quotidienne.
Nous sommes accueillis par deux françaises, Aya et Christina, autour d'un chai (boisson d'ici à base de thé, lait, gingembre, cardamome et sucre). Toutes deux vivent 6 mois de l'année en Inde avec leur compagnon indien et rentrent en France l'autre moitié de l'année pour renouveler leurs visas. L'occasion d'échanger sur les modes de vie, les manques, les difficultés d'occidentaux dans le pays. Discussions très intéressantes pour le cheminement du voyage. Jaisalmer est aux portes du désert de Thar. Il fait très chaud l'après-midi, jusqu'à 40°C. Pourtant, nous ne sommes pas dans la pire saison où les températures deviennent plus qu'accablantes. Nous nous levons très tôt afin de profiter de la "fraîcheur" et de la tranquilité matinales. Il est oppressant d'être sans arrêt interpelés, accostés et parfois nous ne pouvons même pas manger tranquillement. Les Indiens sont très insistants et souvent seule l'agressivité d'un NON peut les éloigner.
Baskets aux pieds, nous nous rendons en courant au lac Amar Sagar à 5 km.
Très naturellement, de jeunes filles viennent vers Amande. Les questions qui reviennent fréquemment sont orientées sur le prénom, la nationalité, l'âge et le mariage. Elles sont belles et dégagent une gentillesse certaine de par leur attitude. Il est très agréable d'avoir une conversation non intéressée, contrairement aux contacts que nous avons avec les hommes ou garçons.
Le plus souvent, nous ne sommes pour eux que des porte-monnaie. Nous n'avons pas la sensation de découvrir un peuple mais d'être des proies. Nous n'éprouvons pas de pitié pour ceux que l'on voit tant ils ne sont pas crédibles. Quand on ne donne pas, les enfants deviennent agressifs. Une situation assez explicite alors que nous comptions admirer un coucher de soleil. A peine assis par terre, un gamin court à toute vitesse vers nous.
- Hello, what's your name?
- Mathieu
- Oh beautiful name ! One pen ?!
- Where are you from ?
- From France
- Oh beautiful country ! One roupie ?!
- Hello my sister. Sister, sister ??
- What's your name?
- Amandine
- Oh beautiful name !
Pendant ce temps, c'est toute la famille qui rapplique, la soeur s'agrippe avec fermeté à la jambe d'Amande à lui faire mal, la mère sort la ribambelle de petits frères... Les femmes ont alors le visage dévoilés.
- Sister, come into my house. A beautiful house.
- No !
- Sister, sister !? Fifty roupies ?!
- No money !
Là toute les femmes remettent le voile et rentrent leur exposition d'enfants.
Nous poursuivons notre virée "jogging" jusqu'au site de Bara Bagh (100 Rp pp + 50 pour l'appareil photo).
Nous rencontrons à l'entrée Raoul, 23 ans, qui se propose de nous guider. Nous le remercions et promettons de revenir le voir pour qu'il nous montre sa "piscine". Le site est très beau malgré la forêt d'éoliennes avoisinante. Il s'agit de cénotaphes royaux. Comme promis, avant de repartir, nous retournons vers Raoul. Il nous emmène à la "piscine" quelques centaines de mètres en contrebas. Il ne nous a pas menti, l'eau est claire et limpide. Elle est même fraiche. Il s'agit en fait d'un puit de plusieurs mètres d'où un homme sort d'ailleurs de sa toilette à notre arrivée. En voyant Raoul et son ami méfiants avant d'y rentrer car ils croient avoir vu un cobra et en imaginant tout le monde se laver ici, nous ne sommes pas tentés par la baignade...
Au fil de la discussion, Raoul se livre et nous raconte son idylle de 2 jours avec une Suisse 2 mois plus tôt. Restés en contact par internet, il cherche à savoir auprès de nous si son histoire a des chances d'avoir un lendemain. Très peu pudique, il nous demande même de prendre une photo tous les trois, lui en slip. Il nous surprend aussi en parlant de son Facebook ou encore de Couchsurfing ! Une personne très sympathique mais malgré tout d'un autre monde. Pour l'anecdote, il ne sait pas nager, pas plus que ses copains qui nous entouraient.
Jamal est le cuistot de notre guest house, homme de ménage et soyons honnêtes le larbin de l'hôtel. (chose normale ici).
Il a 17 ans, ne connait pas sa mère et n'a jamais été à l'école. Il dort sur le toit de l'hôtel.
Comme dans les précédentes villes visitées, le "roof top" est omniprésent à Jaisalmer. Jamal est fier de sa petite cuisine et bien sûr fait la meilleure cuisine. Il insiste pour qu'Amande entre dans son atelier. Elle assistera à la confection des chapatis et de la cuisine indienne dont les ingrédients principaux sont huile et farine mais aussi saletés diverses, poussières, transpiration... Les Indiens disent que s'il n'y a pas beaucoup d'huile c'est "no tasty". Les ingrédients sont à même le sol et le torchon sert à la fois de serpillère, éponge, manique ou toute autre nécessité. La notion de propreté est tout autre ici. Jamal ne comprend pas que l'on ait besoin de tranquilité, aussi il n'hésite pas à rentrer naturellement dans notre chambre d'autant plus que nous sommes bien évidemment ses "best friends". Amande regrette de lui avoir accorder de l'attention car elle ne peut aller et venir sans qu'il la touche. Il a d'ailleurs des gestes brusques car comme la majorité des Indiens ne sait pas vraiment ce qu'est une femme. Surement amoureux, il la colle sans arrêt ce qui amuse Mathieu dans un premier temps. Ce sera moins marrant, lorsqu'il constatera qu'il rentre dans la chambre, nous épie par la fenêtre et pire attend devant la porte qu'Amande sorte de la salle de bain.
Ici, rien ne se perd :
les vieilles chaussures sont source de cuir ;
le journal sert d'emballage à samosa ;
les bidons d'huile deviennent des seaux pour le puit ;
le carton devient de la nourriture pour vache ;
la bouse de vache est mangée par la chèvre ;
le camion arrêté se transforme en abri à chèvre...
En revanche, le gobelet plastique à chai devient ordure de plein air.
Nous n'avons au final pas trop aimé cette ville, bien trop touristique, surtout dans son fort que nous avons parcouru à vitesse grand V. Pas un instant de répit sans démarchage ou mendicité dans l'enceinte du fort. Le palais est beaucoup moins intéressant que celui de Jodhpur que nous venons de visiter. Heureusement que nous avons apprécié l'accueil de l'hôtel et le calme des rues environnantes.
Dans les magasins, quand nous entrons, soudainement la lumière et le ventilo se mettent en marche et, là aussi, impossible de flâner tranquillement. Il est paradoxal de découvrir dans les petites librairies, toutes les éditions relatives au kama sutra alors qu'ici la sexualité est un sujet tabou. Nous remarquons aussi que le pain de mie, les chips, le coca, facebook, le téléphone portable et la parabole sont des éléments universels.
Poissons chats grouillant à la surface du lac qui jouxte la ville (40cm chacun!)
Nous avons loué une moto pour la journée (200 Rp) afin de nous éloigner de la ville. Nous sommes surpris par le prix de l'essence à 1,45$ le litre. Nous découvrirons les portes du désert avec ses villages typiques.
Mathieu laisse sa marque dans le désert...
Cheveux au vent sur sa monture... un scooter poussif
Aura-t-on assez d'essence pour faire le chemin dans l'autre sens ?